Ce fut l'insolent azur de ses yeux qui m'envoûta, ce regard impitoyable qui se fondait en moi comme les vagues indolentes embrassant la plage voisine.
Ce fut la clarté de sa peau qui renvoya à mon esprit l'image des champs de blés, constamment battus par les brises d'été.
Ce fut son visage, elle était belle.
Les roues grinçaient une fois sur deux, le goudron pourpre semblait alors plus ridé que jamais sous les innombrables fissures qui le parcouraient. L'équilibre était là, mais la Chute ne se privait pas de donner quelques coups aux frêles rollers, pimentant d'autant plus la course qui s'avérait bien plus effrénée que d'accoutumée.
La foule était alors pareille à toute les autres, masse difforme et mouvante qui s'étalait le long de la promenade et que je prenais plaisir à fendre. Mes yeux scrutaient sans intérêt l'horizon, cherchant parfois de quoi satisfaire leur curiosité en observant la route plus loin sur laquelle de larges berlines s'engouffraient bruyamment. Le paysage était ainsi semblable aux autres, froid, inanimé, plat.
Ce fut au détour d'un rebond que mes yeux se posèrent sur l'animale beauté. Elle était en vélo et moi en roller, nos roues se croisèrent et le temps d'un instant, le temps s'arrêta.
Elle avait les yeux semblables à l'horizon un clair jour de printemps, l'indolence de son visage me rappelait ce à quoi j'aspirai : La liberté. Nos regards se croisèrent, une seconde, peut être un peu plus. Mais bien assez longtemps pour dire plus de choses qu'en une vie, sa capuche couvrait son crâne, laissant s'échapper les furieuses boucles d'or qui s'engouffraient alors sous les flancs venteux de sa course.
Elle me regarda, ses mains s'agrippaient férocement au guidon alors que son corps vibrait sous les impulsions de ses roues. Elle ne semblait pas vraiment me voir, comme je ne semblais pas vraiment la voir, mais nos âmes se parlaient, c'était certain. Comme si le temps s'était stoppé des années, années que nos esprits inconscients auraient passer l'un face à l'autre, immobiles mais non moins vivants.
Ce fut son visage qui m'envoûta.
Ce fut son regard qui m'appela.
Ce fut son visage, elle était belle.
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